Duty Free : l’ivresse du pouvoir

Dans son premier budget en 2004, Pravind Jugnauth partageait son rêve de transformer Maurice en une Duty Free Island. Deux ans durant, c’était presque une obsession chez lui. A son retour comme grand argentier en 2010, pas un mot de sa formule magique qui allait transformer le pays. Pourtant il semble exister un lien bien caché entre Pravind Jugnauth et les boutiques Duty Free. L’ivresse du pouvoir

 

En cette période de campagne, alors que les propagandistes MSM focalisent leur tire sur les transactions douteuses de la femme d’affaires Nandanee Soornack et les commissions perçues par FRDU, il est inimaginable que tout le crédit de l’ingéniosité nécessaire pour la mise en place de cette structure soit attribué à l’ancienne « marchande de cotomilli »

Dans un article publié en 2012 dans le journal Capital, Rudy Veeramundar, rédacteur en chef d’alors et actuel Directeur de Communications au bureau du premier ministre, faisait état des retro commissions dans l’octroi du contrat pour la gestion de nos boutiques hors taxe.

 

Qu’est-ce qui fait courir Pravind Jugnauth ?

Quelles sont les réelles motivations du leader du Mouvement socialiste militant (MSM), Pravind Jugnauth, dans le dossier du ‘tender’ alloué récemment par le ‘Mauritius Duty Free Paradise Ltd’ (MDFP) pour l’approvisionnement de la boutique hors-taxe à l’aéroport ? C’est la question qu’on est en droit de se poser compte tenu du nombre de conférences de presse consacrées par le leader du MSM à ce dossier, donnant l’impression de s’être transformé en lobbyiste de l’un des soumissionaires non-retenus.

Ce que les observateurs n’ont pas manqué de noter, c’est que les dénonciations de Pravind Jugnauth étaient basées uniquement sur le ‘tender’ soumis par Geibr Heinemann, une compagnie allemande basée à Hambourg, et dont dont le co-propriétaire est Claus Heinemann. «La vigueur avec laquelle le leader du MSM a défendu l’offre de la compagnie allemande sur ce dossier aurait fait pâlir d’envie les lobbyistes américains qui arpentent les couloirs du Congrès americain», nous a fait remarquer un diplomate ayant servi à Washington. Geibr Heinemann, il faut le souligner, a approvisionné la boutique hors-taxe continuellement depuis 2004, réalisant un chiffre d’affaires de Rs 8 milliards. Ce qui laisse supposer une commission fort alléchante pour ses agents.

Ils seraient au nombre de deux, les agents qui ont fait du lobbying en faveur de Heinemann. L’un est basé à Londres et le deuxième serait un ancien haut cadre de la compagnie nationale d’aviation. L’agent londonien, un dénommé AG, est très proche d’un dirigeant politique mauricien. Il avait été vu, lors d’une consultation populaire, gravitant dans l’entourage de l’homme politique. Lors de ses vacances mauriciennes, AG loue une suite dans un hôtel du littoral sud.

Rétro-commission

Selon les renseignements dont nous disposons, il avait même mis une Berline à la disposition de l’homme politique, le temps d’une campagne électorale. De plus, selon notre enquête, quand l’homme politique et les membres de sa famille sejournent à Londres, c’est AG qui se charge de la réservation aussi bien que du règlement de la note à l’hôtel Dorchester dans la capitale britannique. Pour marquer ses 80 années d’existence, l’hôtel situé dans le quartier huppé de Mayfair, à Londres, propose une chambre à Rs 30 000 la nuitée alors qu’une suite est offerte à Rs 45 000.

Toujours selon notre enquête, AG versait mensuellement une rétro-commission de Rs 1,5 m à l’homme politique mauricien pendant toute la durée du contrat liant Heinemann à la MDFP, c’est-à-dire de 2004 à janvier 2011. Quant à l’ancien cadre d’Air Mauritius, il avait été chargé d’effectuer un ‘lobbying’ très intense auprès des membres du conseil d’administration de la MDFP.

Il faut aussi ajouter qu’au moment où Pravind Jugnauth était ministre des Finances, de mai 2010 à juin 2011, l’un de ses conseillers avait rencontré, à son bureau, un haut cadre d’une autre compagnie suisse qui était parmi les compagnies présélectionnées pour participer à l’appel d’offres que la MDFP s’apprêtait à lancer.

Le visiteur suisse était accompagné d’un homme d’affaires, connu pour s’être déjà fait remarquer, dans le passé, arborant très fièrement un t-shirt frappé à l’effigie de Sir Anerood Jugnauth, à un rassemblement du parti soleil.

 

Le contenu de cet article n’a jamais été contesté. Ni celui d’avril 2015 où Capital mettait en évidence le lien ombilical entre Pravind Jugnauth et Rakesh Gooljaury. Plusieurs témoignages confirment la complicité entre ces deux hommes. D’ailleurs l’impunité et les largesses dont l’homme d’affaires jouit sont trop flagrantes.

L’explication la plus simple et plus plausible, est que le mécanisme de retro commission existait déjà, ou le porteur d’affaires pour le compte des fournisseurs des produits hors taxe étaient rémunérés à hauteur de 4 – 5% du chiffre d’affaires. En 2015, après une vaine tentative de se fournir auprès d’un agent infaillible du MSM, le contrat est alloué a nul autre que la société fétiche, Heinemann.

Dans une plainte logée le vendredi 6 mars 2015, deux anciens Attorney General demande aux autorités de mener une enquête sur le contenu de l’affidavit juré par Simo Carevic, CEO de la Mauritius Duty Free Paradise (MDFP) et Thomas Galet, Deputy Chief Operating Officer Africa de de la société suisse Dufry. Ces deux cadres affirment avoir étés séquestrés et intimidés par trois ministres de la République de Maurice, le 16 février 2015. A ce jour l’enquête peine à démarrer.

 

 

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