SACS DE CAISSE

Au début des années 2000, la tendance était mondiale : réduire l’utilisation des sacs en plastique jetables et encourager un retour au bon vieux cabas tout en proposant une option considérée plus écologique : le sac en papier. Mais au fil des années, le plastique, biodégradable ou pas, allait se montrer à la hauteur de sa mauvaise réputation : on ne s’en débarrasse pas aussi facilement !

L’hégémonie du plastique

Au Parlement, c’est le député Siddick Chady qui évoquera pour la première fois le recours éventuel aux sacs plastiques biodégradables… La réponse du ministre
Bhagwan : « (…) They are very expensive. This issue is being debated actively in the House of Commons (in Great Britain) »

IL Y a une quinzaine d’années, demander un sac « 50 sous » ou « 1 roupie » en passant à la caisse était devenu presqu’un automatisme… et ce, même lorsqu’il ne coûtait pas un sou au consommateur. En effet, dans certains commerces, en particulier les supermarchés et magasins, il était offert alors que dans d’autres, il fallait débourser selon la « taille » du sac. Même s’ils n’étaient pas à usage unique, ces sacs constituaient un véritable « eyesore » lorsqu’ils atterrissaient dans la nature, et on allait plus tard se rendre compte du désastre écologique qu’ils étaient susceptibles de provoquer.

En 2002, les autorités mauriciennes décrètent l’interdiction d’importer ou de fabriquer ces «plastic carry bags » qui n’étaient pas biodégradables. Les entreprises locales engagées dans la fabrication ou l’importation de ces produits ainsi que les commerçants étaient mis devant le fait accompli tout en bénéficiant d’un moratoire d’un an pour s’adapter à cette nouvelle situation.

Cette mesure s’inscrivait surtout dans le cadre plus élargi de l’initiative visant à réduire de manière considérable l’utilisation du plastique, notamment les bouteilles en PET (polytéréphtalate d’éthylène). Mais le contrôle sur ces sacs devenait une priorité car ceux-ci, contrairement aux bouteilles, ne faisaient partie d’aucune filière de recyclage. A l’époque, les statistiques s’affolaient, affichant un nombre annuel de… 227 millions de sacs plastiques mis sur le marché. Au moins 30 millions étaient offerts dans les supermarchés et hypermarchés. Mais cette mesure ne concernait que les sacs dits « légers», faisant moins de 80 micromètres d’épaisseur (excluant le plastique utilisé pour l’emballage d’aliments et l’empaquetage). Une porte restait ouverte pour les sacs plus résistants, que les consommateurs seraient en mesure d’utiliser plusieurs fois.

CONSCIENTISATION

Lorsque le gouvernement annonce en 2002 cette « bold decision », selon les termes du ministre de l’Environnement d’alors, Rajesh Bhagwan, le sac en plastique
biodégradable n’est pas à l’ordre du jour. Le ministre annonce une série d’initiatives pour conscientiser la population sur les effets néfastes du plastique et l’importance de se tourner vers des options durables, en faisant référence notamment aux « tentes vacoa », sacs en jute, toile ou papier. Des milliers de sacs réutilisables sont distribués par le National Environmental Fund dans les écoles pour sensibiliser les plus jeunes.

Mais l’impact s’avèrera minime. Si le plastique recule un peu, c’est pour mieux sauter. Les supermarchés profitent du nouveau format des sacs pour y afficher leur identité. Les consommateurs les improvisent en sacs-poubelle, qui se retrouvent finalement dans la nature ou le centre d’enfouissement…

A peine deux ans plus tard, c’est justement cette mesure qui est imposée pour tenter de limiter les dégâts. Seuls les sacs biodégradables d’une épaisseur d’au moins 20 micromètres sont autorisés, les fabricants et les commerçants disposant d’un moratoire de trois mois pour se débarrasser de leur ancien stock. Les producteurs sont, à partir de là, tenus d’incorporer un additif dans le procédé de fabrication pour accélérer le processus de dégradation des sacs (qui prend une année au lieu de 50 à 100 ans pour les sacs nondégradables). Les autorités mettent tout en œuvre pour s’assurer que ces règlements sont respectés, notamment en mobilisant les effectifs de la police de l’Environnement pour des contrôles rigoureux. Sans oublier l’intensification de la campagne auprès du public. Celui-ci est réceptif au début, mais le naturel reviendra vite au galop… Pour corser le tout, le biodégradable ne donne pas les résultats escomptés.

POLLUEUR-PAYEUR

Aux grands maux les grands moyens : en 2006, le gouvernement décide d’imposer une taxe d’une roupie, excluant la taxe sur  la valeur ajoutée, sur le sac plastique. Le client désireux d’en faire l’acquisition doit alors débourser Rs 1.15. « The purpose is to discourage their use, encourage their reuse or a shift towards thicker reusable bags with a view to minimising their impact on the environment ». Les associations de consommateurs crient au scandale et jugent cette mesure abusive, en particulier parce que les supermarchés et autres commerces continuent à afficher leur identité sur ces sacs. Ceux dépourvus de manches ne sont pas (encore) concernés et les producteurs les écoulent allègrement dans le commerce pour contourner le problème pollueur-payeur… Mais les autorités n’en démordent pas, et même ces sachets seront par la suite taxés.

Dans le budget 2010, la taxe sur les sacs plastiques est doublée… Les sacs en papier essayent alors de se frayer un chemin, mais ils coûtent plus cher, sont moins
pratiques et plus fragiles. Ceux qui ont le réflexe écolo n’attendent pas que la caissière leur pose la question « sac en papier ou en plastique ? » pour faire leur choix. Mais le papier, c’est pas le pied et ça n’emballe personne ! Le plastique, en revanche, prouve jusqu’aujourd’hui qu’il a décidément plus d’un tour dans son sac…

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