JOHANNESBOURG, Afrique du Sud (OIT Infos) – Selon un nouveau rapport, intitulé The Next Normal: The changing Workplace in Africa – Ten Trends from the COVID-19 Pandemic that are Shaping Workplaces in Africa (La future normalité: l’évolution des lieux de travail en Afrique – Dix tendances de la pandémie de COVID-19 qui façonnent les lieux de travail en Afrique), si l’Afrique a été durement touchée par la pandémie de COVID, les travailleurs et les entreprises ont fait preuve de beaucoup de résilience et d’adaptabilité pour relever les défis. Cependant, la pandémie a radicalement modifié le lieu et la manière de travailler, bouleversant bon nombre des normes et pratiques établies de longue date. Les entreprises et les travailleurs ont procédé à de nombreux changements, souvent dictés par la nécessité et généralement porteurs d’améliorations inattendues en termes de productivité ou de conditions de travail.
Publié le 12 mai, le rapport identifie les grandes tendances sur l’ensemble du continent. Aucune tendance n’a sans doute mieux défini la période de la pandémie que le passage du travail sur site au travail à distance. Trente-six pour cent des travailleurs au sein des entreprises interrogées ont travaillé à distance au cours de la pandémie. Sans surprise, on constate que le travail à distance est plus répandu parmi certaines catégories de travailleurs, ce qui semble indiquer que le type d’emploi de la personne et le secteur de l’économie dans lequel elle travaille déterminent aussi sa manière de travailler – à présent et pour l’avenir. L’avenir s’annonce plutôt sous le jour d’un travail hybride que d’un travail entièrement à distance (seules 4 pour cent des entreprises affirment qu’elles vont complètement passer au travail à distance).
Malgré toute les difficultés causées par la pandémie, la productivité a progressé ou s’est maintenue au même niveau dans la plupart des entreprises – une conséquence imprévue de la pandémie pour de nombreuses entreprises qui ont été contraintes de trouver de nouvelles façons de faire les choses. Quatre-vingt-cinq pour cent des entreprises sondées dans le cadre de ce rapport ont déclaré que les changements liés au COVID s’étaient traduits soit par une amélioration de la productivité soit par un statu quo. De plus, 46 pour cent des entreprises consultées ont indiqué que la modification de leurs processus opérationnels avait entraîné des gains de productivité. Ces gains de productivité sont dus en partie à la recherche de processus numériques pour remplacer les processus traditionnels. Quatre-vingt pour cent des entreprises ont révisé leur manière de mesurer la productivité depuis le début de la pandémie; elles se focalisent de plus en plus sur les résultats comme critère clé de mesure de la productivité. En fait, une grande majorité des entreprises – 81 pour cent – disent qu’elles privilégient désormais les résultats comme principale mesure de leur productivité.
Les besoins en compétences des entreprises constituent un autre changement majeur. Les compétences en matière de numérique, de communication, d’innovation et de travail en équipe sont apparues comme les principales priorités des entreprises. Plus de 40 pour cent des entreprises ont cité chacun de ces types de compétences parmi leurs trois plus gros besoins à l’avenir. Les entreprises ont également modifié leur manière de former, de partager les connaissances et de collaborer. L’un des changements les plus fréquents en matière de formation et de collaboration a été l’essor des cours de formation numériques, adoptés par plus de 50 pour cent des entreprises sondées pour ce rapport.
La pandémie a creusé les inégalités entre hommes et femmes au travail. Les raisons de ce phénomène sont nombreuses et complexes : ainsi, la charge du travail de soins non rémunéré incombe de manière disproportionnée aux femmes, associée à une augmentation de la demande de soins liée à la fermeture des écoles; les femmes ont davantage tendance à occuper des emplois à temps partiel, temporaires et précaires, souvent dans des secteurs durement touchés par les mesures de restriction et de confinement, tels que les loisirs, l’hôtellerie et le commerce de détail; de même, les travailleuses sont plus nombreuses dans les secteurs de première ligne et à haut risque en Afrique.
En présentant le rapport à Johannesbourg, la Directrice du Bureau des activités pour les employeurs de l’OIT, Deborah France-Massin, a indiqué que les changements induits par le COVID auraient des répercussions profondes sur les politiques publiques au cours des années à venir. Le principal problème est que les cadres légaux et réglementaires de nombreux pays n’ont pas suivi le rythme de l’évolution des modalités de travail. Les dirigeants d’entreprise nous ont signalé que la réglementation du marché du travail était en retard.
S’exprimant à l’occasion de cette présentation, Cynthia Samuel-Olonjuwon, Directrice générale adjointe de l’OIT et Directrice régionale pour l’Afrique, a souligné que les tendances décrites dans le rapport et le nouvel accent mis sur l’amélioration de la protection sociale et la réduction de l’économie informelle auraient des conséquences majeures pour l’avenir des lieux de travail. Elle a fait remarquer que si certains de ces changements – et leurs conséquences – apparaissent clairement, de nombreuses questions restent sans réponse quant à la portée et à la plénitude de leurs effets sur les sociétés africaines. Cependant, il est d’ores et déjà clair que ces changements sont d’une ampleur considérable. Il est donc indispensable que les parties prenantes amorcent ou approfondissent dès maintenant le dialogue sur la manière de gérer ces changements, a-t-elle ajouté.
*** Le rapport est basé sur une enquête réalisée auprès de plus de 1 000 entreprises sélectionnées de manière non aléatoire, qui représentent au total près des 750 0 000 employés dans un large éventail de secteurs économiques dans 15 pays africains, ainsi que sur plus de 125 entretiens qualitatifs et plusieurs études de cas.
Contacts:
- Maria Angeles Palmi Reig, Chargée de communication, Bureau des Activités pour les employeurs (ACT/EMP), palmireig@ilo.org
- Jennifer Patterson, Responsable régionale de la communication et de l’information publique, Bureau régional pour l’Afrique, patterson@ilo.org