- Au XVIIème siécle, les médecins ne parvenaient pas à soigner la peste, mais ils prétendaient en être capables. Ils revêtaient un masque et des lunettes qui, prétendaient-ils, les préservait du mal. Identiquement, pendant l’épidémie de grippe espagnole, le gouvernement japonais ordonna à sa population de porter des masques chirurgicaux européens pour les préserver de la maladie. Aujourd’hui, le masque s’est généralisé, cette fois contre la Covid. Cependant les études sont formelles : la généralisation de ces masques n’a aucun effet sur la propagation de maladies bactériennes ou respiratoires.
L’obligation du port généralisé du masque est emblématique de la gestion de la « pandémie ». Cette contrainte n’est pas d’ordre sanitaire et témoigne d’un hors sens. C’est un commandement se présentant, en même temps, comme une loi et la destruction de celle-ci. Elle est le passage à l’acte d’une sortie du Politique.
Les raisons de l’obligation peuvent se résumer au fait que, sans elle, il n’y aurait aucun signe manifeste de « l’extrême » gravité » supposée de la covid. La centralité du port du masque réside dans le fait, qu’en nous rappelant constamment la « pandémie », la contrainte nous place dans le regard du pouvoir nous confisquant notre intime.
Elle réduit la conscience à un « s’éprouver soi-même ». « L’expérience de ne pas pouvoir sortir de soi [1] » n’est pas une chose extérieure, elle n’occupe pas une partie de notre existence, elle devient notre vie même.
Ce qui s’éprouve marque le « covidé », car c’est un discours sans parole, ne pouvant s’inscrire et ainsi faire corps. Il empêche tout oubli et ne peut être refoulé. Constamment réactivée, l’obligation du port du masque provoque un éternel retour du traumatisme.
Le discours sur la « pandémie » s’oppose à la culture, il nous enferme dans « la vie nue ». Il menace la capacité de tout être humain de refouler, afin de de ne pas être pétrifié. Ici, le masque corona dévoile directement le Réel humain, plus précisément, son « être pour la mort ».
L’obligation devient alors une loi suprême conditionnant notre « liberté » et instituant un rapport négatif avec soi et avec l’autre. Elle nous enjoint de renoncer à notre vie. Le réel de la mort n’étant plus canalisé par la culture, il recouvre la totalité de l’existence.
Ainsi, le masque corona n’est pas l’articulation du symbolique et du réel. Il n’est donc pas un masque, car il n’est pas voilement. À l’opposé du masque grec ou romain, il ne dissimule pas le visage, il le fait disparaître.
Là où porter un masque relevait d’une fonction de protection du corps symbolique, il devient, ici, profanation du corps social et individuel. Il n’est plus, comme le masque de l’antiquité grecque, une articulation entre le visible et l’invisible et ne permet plus d’accéder à un réel voilé. Le masque corona est au contraire une provocation du Réel, permettant un déchaînement de la pulsion de mort.
La pulsion de mort est la structure même de la pandémie. Générique et universelle, elle se « fonde sur une détresse physiologique et sur la rage impuissante » [2] de l’infans, de celui qui ne peut parler. Elle empêche tout libre arbitre et induit une acceptation généralisée du port du masque. Cette pulsion devient la revendication d’un idéal qui est d’échapper à la condition humaine et ainsi l’acceptation d’un passage vers le transhumanisme.
Un « faire voir »
C’est bien dans le cadre d’un « faire voir » que l’OMS recommande [3] de porter le masque, alors que, en même temps, il reconnaît que ce dispositif ne permet pas d’arrêter le virus et de protéger celui qui le porte. L’avantage que l’organisation voit dans cette incitation réside dans la modification des comportements des populations, qui sont encouragées à fabriquer elles-mêmes leur propre masque et à prendre ainsi activement part à leur destruction.
Pour l’OMS, le masque devient aussi « un moyen d’expression corporelle », propre à favoriser l’acceptation globale des mesures de « protection » [4]. Bien que l’action du pouvoir ait pour effet de propager la maladie, porter le masque devient une demande de protection. Le masque est alors communion avec l’autorité, une adhésion devant relever d’une initiative personnelle de se soumettre à des injonctions dé-réalisantes.
Le pouvoir rend la « pandémie » terrifiante en tant que vie contaminée [5]. Son existence est alors construite comme un fait social « total, irréversible, imprévisible et irréparable [6] ». Le port permanent du masque devient alors le paradigme de la catastrophe. Il est exhibition, par les porteurs eux-mêmes, de mesures qui, non seulement, ne les protègent pas, mais les affaiblissent physiquement et psychiquement. L’adhésion au discours du pouvoir est une fixation mortifère à son dire, elle résulte d’une une technique de soumission qui fait reporter la charge de l’asservissement sur les individus qui s’y soumettent.
À travers le port du masque, nous portons notre culpabilité, celle d’être un vecteur de transmission de la maladie, un péché dont nous devons nous purifier par un surcroît de soumission. Alors qu’elle est déjà plus que respectée par la population, l’injonction de porter le masque est constamment répétée. D’abord présentée comme une mesure provisoire en l’attente du vaccin salvateur, il est aujourd’hui affirmé que, malgré la vaccination, le port du masque s’avérera toujours nécessaire [7].
Le masque corona s’inscrit dans l’idéologie de la transparence. Le visage qu’il dissimule disparaît comme simple reflet du regard de l’autre [8]. Il renvoie à une image béante, dont le porteur ne peut s’absenter. Le masque permet ainsi une identification avec le regard médusant. Il en résulte une relation incestueuse, une fusion avec la jouissance du pouvoir, relevant de l’obscène.
Le masque : une technique d’enfermement
Partout dans le monde, le pouvoir a mis en pratique des techniques d’isolement de plus en plus sophistiquées, telles les prisons de type F [9], devant produire un état de privation sensorielle du prisonnier.
L’isolement caractérise la modernité. Il se retrouve à la fois dans la société et dans la prison. Ici, dans la pandémie, la technique d’enfermement relève de la post-modernité. Le confinement, le port du masque ou les mesures de distanciation n’ont pas pour seul but d’isoler le corps du covidé du corps social, mais aussi de le couper de lui-même.
Le traitement réservé actuellement à notre corps fait immédiatement penser à la technique d’enfermement utilisée au bagne de Guantánamo. Ce camps inaugure une nouvelle exhibition, non du corps, comme dans l’ancien régime ou dans la mise au travail du début du capitalisme, mais de son image, plus précisément une négation de l’image du corps.
Non seulement les yeux des prisonniers étaient masqués par des lunettes opaques, mais leur nez et leur bouche étaient recouverts par un masque chirurgical. Le corps du prisonnier est confisqué, non pas pour le soumettre, mais pour qu’il reste enfermé en lui-même. Rien ne doit détourner l’esprit du prisonnier d’un enfermement, devant être perçu comme n’ayant ni début et surtout ni fin [10].
Les dernières fonctions d’un emprisonnement, sans limite de temps, se retrouvent dans le port du masque corona. Le recouvrement des mains par des gants et le port permanent du masque médical ne sont pas les seules procédures communes avec le bagne de Guantánamo. Dans les deux cas, l’emprisonnement est à la fois extérieur et intérieur. Il nous enferme dans notre impuissance et nous conduit à un état, plus ou moins avancé, de privation sensorielle, productrice de la psychose. Coupé des autres et de lui-même, le psychotique n’est plus « en communication » qu’avec le virus et les injonctions des autorités. Les corps masqués donnent alors une visibilité à l’invisibilité de la guerre contre le coronavirus, de même que les images des prisonniers de Guantánamo donnent une existence à la guerre contre le terrorisme.
La fabrique de la psychose
À travers les images de Guantánamo, le spectateur est regardé par le spectacle, par le « trou du regard » [11]. Il est pris dans la pulsion scopique, où l’essentiel est de se regarder être regardé. Cette passivité est participation au laisser faire, au laisser montrer, au laisser dire et en jouir.
Par rapport à la réception, sans condamnation explicite, des images de Guantánamo, l’embrigadement dans la « guerre contre le coronavirus » est une étape supplémentaire dans le renoncement de notre humanité.
L’acquiescement, à ce qui est dit et montré, n’est plus seulement passif, mais actif. La personne n’est plus simplement sidérée par un visible qui lui reste extérieur, elle doit se refaire et intégrer activement la mobilisation de la pandémie, être « en marche », dans sa destruction en tant qu’être humain, ainsi que dans sa recomposition en tant que « transhumain ». Dans la « guerre contre le coronavirus », il n’y a plus de distinction intérieur/extérieur. Cette fusion d’ordre psychotique existe, non seulement au niveau individuel, mais aussi sociétal.
La fabrication de la psychose est depuis longtemps une préoccupation de nos dirigeants. Les techniques de privation sensorielles appliquées à Guantánamo permettait de fabriquer des individus psychotiques en deux jours. Ces techniques étaient une application directe des recherches de psychologues comportementalistes, dont Donald O. Hebb de l’université Mac Gill au Québec [12].
Dans le cadre de la « guerre contre le coronavirus » et des expériences, telles que les procédures de tortures appliquées à Guantánamo, le corps est capturé, non pas pour être brisé comme sous l’ancien régime, ou discipliné comme dans l’organisation capitaliste du travail, mais pour être anéanti. Il s’agit ici d’une condition préalable, devant permettre une reconstruction dans le cadre du transhumanisme.
Une capture du Réel
La « guerre contre le coronavirus », dépasse la « lutte antiterroriste ». Elle n’est pas un conflit contre une partie, contre une catégorie de la population, mais elle convoque le Réel, elle s’attaque à la possibilité même du vivant. Le pouvoir, à travers la techno-science, est en concurrence avec ce qui lui échappe en permanence.
Le port du masque est une anticipation de la capture du réel humain. Il relève d’une procédure d’évitement relationnel qui fait que l’autre n’existe plus. Quelque chose du Réel est capturé : le désir de relation. Dès lors, les gens qui mettent le masque ne portent pas la parole, mais le cri de celui qui est devenu personne. Ils exhibent à la fois le rejet de l’autre et ce qui en résulte, leur propre anéantissement.
Le port du masque corona produit une perte de « l‘appétence symbolique », de ce désir de relation se manifestant en dehors de la satisfaction des besoins élémentaires de la survie [13].
La « rencontre primordiale avec l’autre » est une poussée pulsionnelle, celle de la pulsion de vie, essentielle dans la mise en place d’un lien avec l’extérieur.
Ce donné, destiné à agir au niveau de l’ensemble de la vie, est aujourd’hui attaqué par le port du masque. Il devient un rejet de l’autre, une destruction de cette « appétence symbolique », c’est à dire de la condition primordiale devant assurer la formation d’un lien social. Il est la matérialisation d’un rejet de l’autre et de soi même, en tant que personne. Il est l’exhibition d’une contagion, non plus celle d’une maladie, mais celle d’une conception escatologique de la impossibilité d’un devenir humain.
La tour de Babel
L’obligation généralisée du port du masque est le symbole d’un effondrement des frontières collectives et individuelles, celles qui délimitent les États, mais aussi celles qui permettent, à travers la distinction d’un dehors et d’un dedans, la formation d’un sujet individuel et collectif.
Le port généralisé du masque est un bâillon. En supprimant toute singularité et en imposant « une absence de langue, une impossibilité de parler » [14], il construit une nouvelle tour de Babel. Il ordonne un « dire clos », car il faut deux lèvres qui s’écartent l’une de l’autre pour parler. Le masque corona permet ainsi l’installation d’une nouvelle universalité monadique de la condition humaine , où plus « personne ne se distingue de tous les autres ».
La frontière est constitutive de l’imaginaire individuel et social. Elle est ce qui permet de construire un sens. Ici, dans la pandémie, leur fonction de médiation étant abolie, les « institutions imaginaires de la société », les organisations de la société civile, sont désactivées et se renversent en leur contraire. Au lieu d’inscrire une limite et d’être un cran d’arrêt à la toute puissance du pouvoir, elles deviennent une simple courroie de transmission de ses injonctions. Elles se réduisent à un acte d’auto-mutilation volontaire comme expression d’un surmoi archaïque, que l’on peut, comme Lacan, qualifier d’obscène [15].
Sans qu’un centre de décision soit clairement identifié, le port du masque se présente immédiatement comme une obligation mondiale. S’il supprime les frontières politiques, il abolit aussi toute démarcation entre soi et l’autre. La globalisation de la « pandémie » efface toute différence, elle exhibe une quasi disparition de l’État nation et procède à un effacement de la personne, en tant qu’entité juridique et psychique. S’opère ainsi, à tous les niveaux, une fusion entre le dedans et le dehors, c’est à dire l’installation d’une psychose généralisée, conduisant les peuples et les individus à acquiescer à leur destruction.
Ainsi, le port du masque corona entraîne une indifférenciation du moi et du non-moi, du sujet et de l’objet. Privé de sa capacité de discernement, l’individu ne peut nommer le réel. De cette indifférenciation, résulte une fusion avec les choses elles-mêmes. Le masque corona permet ainsi l’installation d’une structure schizophrénique, où l’individu s’identifie avec les objets du discours. Il devient son masque.
« Donner corps » à la pandémie ou donner du sens au « pas de sens »
Dostoïevski nous a rappelé, dans Les frères Karamazov, que ce qui caractérise l’être humain est l’abandon de son existence [16], afin d’en faire l’offrande au pouvoir. Ici, dans la gestion de la « pandémie », le renoncement des populations résulte de la destruction des institutions imaginaires de la société et de leur lien avec l’ordre symbolique. Ces instances tels le syndicat, la famille, l’Église, la presse, le pouvoir juridique… , des organisations qui constituent une défense contre le pouvoir absolu et qui sont à la base du lien social, sont aujourd’hui, non seulement désactivées, mais renversées. Elles ne font plus corps, mais, au contraire sont impactées par le processus de décorporation de la société et mobilisées dans la « guerre sanitaire ». Le corps individuel ou social n’est plus qu’une chair marquée par le discours du pouvoir, par la rencontre de la « jouissance absolue », caractérisant la structure psychotique [17].
En établissant une rupture avec l’autre et avec soi-même, le masque corona procède à un double clivage. Il est avant tout un « faire voir ». Ainsi, les médias ne déforment pas la réalité, ils la fabriquent [18]. Ils installent un processus de sidération. Le monde est alors réduit à un « faire voir » convoquant la jouissance [19]. Cette dernière forclos le corps désirant. Elle ne donne pas de sens, mais relève de l’impensable, du hors-sens.
Alors, la jouissance, hors sens et hors corps, devient addictive. L’automatisme de répétition s’impose au principe de réalité. Il instaure une jouissance du traumatisme qui, en tant que machine de répétition, a pour effet d’anéantir tout avènement d’un sujet, qu’il soit individuel ou collectif. Exclu de l’Autre, le corps se réduit à son réel anatomique et devient un simple support de la pulsion de mort.
Dès lors, le port du masque est un acquiescement des populations à leur destruction, l’acceptation de déposer notre corps, comme on dépose ses armes. Le corps doit disparaître, afin que puisse apparaître la « pandémie ».
Il est également un « oui » à la mort du sujet parlant et est une acceptation du fait d’être capturé par le pouvoir. Le masque agit en tant que marque donnant corps à la maladie. Ici, les individus n’ont plus un corps, mais sont un corps, celui de la « pandémie », comme ils étaient le corps des victimes des attentats de Charlie Hebdo, grâce à leur adhésion au slogan « Je suis Charlie » [20].
« L’insécurité éprouvée » : une volonté de jouissance
La « guerre contre le coronavirus » est une machine à jouir. Fondée sur une suppression du droit, elle fusionne la violence et le sacré. Elle nous confirme que la question centrale chez l’être humain, en tant qu’individu coupé de l’Autre, n’est pas celle de la liberté, mais plus fondamentale encore, celle de sa jouissance. Ici, elle n’est plus articulée au corps et tourne sur elle-même, elle forme ce que la psychanalyse appelle une compulsion de répétition. Il s’agit d’une jouissance mortifère où l’énergie vitale, convoquée par le commandement surmoïque, se retourne contre elle-même.
Cette jouissance constitue un impératif catégorique refusant tout ce qui peut la limiter. À travers le port généralisé du masque, elle est une mise en scène de l’obscène. Devenu « maître du temps [21] », le virus incarne le seul Maître et la seule Loi, auxquels les individus doivent se soumettre volontairement. Ces derniers deviennent des soldats de la pandémie, des acteurs de leur propre destruction.
L’insécurité devient générale et fait obstacle à la possibilité d’être avec l’autre. Nous ne sommes plus dans le langage, mais dans ce qui s’éprouve [22], non plus dans le « sentiment d’insécurité », tel qu’il a été développé par la « lutte antiterroriste », mais dans « l’insécurité éprouvée ». Ainsi, le port du masque corona produit, à travers le discours du pouvoir, un « sentiment qui atteint un tel degré d’intensité… qu’il a engendré chez beaucoup… un véritable “désir de catastrophe” » [23]. Ce sentiment devient volonté de jouissance, soutenant l’offrande de son corps et de sa vie, aux impératifs de la puissance étatique.
Ce faisant, s’opère une transformation au niveau de la conscience. Elle n’est plus celle d’un objet déterminé, mais celle de l’éprouvé, d’un « donné originaire » qui se substitue à la perception. L’individu est alors délié du langage et s’engage « dans le néant [24] », dans « l’absolue positivité chosique » du masque. On devient la chose d’un masque, porteur du regard du pouvoir.
Quand on s’éprouve, on ne peut pas penser, car le langage est instrumentalisé, il devient un simple moyen de communication, de « communion » ou de « contagion », tel que le pose Georges Bataille. Pour lui, communiquer est « une idée de fusion », c’est sortir de soi et se fondre avec l’autre [25]. Ici, la monade, qui s’éprouve à travers la pandémie, communie et fusionne avec le pouvoir.
Démasquer la pulsion de mort
Confirmant que le principe d’identité se loge essentiellement sur le visage, le port du masque se présente comme un donné originaire, porteur d’un trouble obsessionnel compulsif empêchant toute inscription de l’autre. Il apparaît ainsi que « s’en défaire provisoirement [du visage] à travers le port d’un masque… est un acte où l’individu… franchit le seuil d’une possible métamorphose [26] ».
Si le visage voile « l’être pour la mort » et rend possible le lien social, le masque corona est un dévoilement qui dérobe les traits de son porteur. Il « lève le verrou du moi et laisse libre cours au jaillissement de la pulsion [27] ». Le port du masque corona, comme support de l’appareillage pulsionnel, est au cœur du dispositif « sanitaire ». Il a pour fonction la décomposition du corps symbolique, l’annihilation de ce qui fait de nous des êtres humains.
Cette « dé-liaison » déchaîne la pulsion de mort, productrice d’une auto-mutilation de son porteur. Grâce à l’obligation du port du masque, cette pulsion [28] insiste, elle se répète sous la forme d’un traumatisme, rompant les corps individuel et social.
Ne pouvant plus s’articuler au champ de l’autre, elle est une décorporation, un « flux du vécu [29] » devenant une compulsion de répétition. Le port du masque empêche toute rupture avec le discours du pouvoir et permet l’éternel retour du traumatisme. Il est un fétiche se substituant à toute symbolisation.
Or symboliser, c’est déjà établir une distance avec l’injonction surmoïque et exister comme un « nous », c’est refuser d’être « pris un par un [30] » dans cette guerre contre le genre humain et ainsi contrer une « attaque du collectif à travers les individus ».
[1] Olivier Clain, « Fonder le symbolique ? Sur la mort et la loi », Intervention au colloque du CNRS, Actualités du symbolique, 25 octobre 2004, p. 9.
[2] Martine Coeren, « Dansez sur moi, dansez surmoi », Le Bulletin freudien, n° 45, janvier 2005.
[3] OMS, « Conseils sur le port du masque dans le cadre de la COVD-19 : orientations provisoires », 5 juin 2020.
[4] Alexandra Henrion-Caude, « On vous dit tout sur les masques », 26 septembre 2020.
[5] Dictionnaire des risques, sous la direction de Ives Dupont, Armand Colin, 2006, Introduction.
[6] Dictionnaire des risques, Op.cit.
[7] « Malgré les vaccins, il va falloir continuer à porter le masque », Courrier International, 9 décembre 2020.
[8] Tülay Umay, « Tansparence », Solidarités, 9 juin 2009.
[9] La prison de « type F » est basée sur le concept carcéral d’isolement du prisonnier politique, c’est-à-dire que la détention de ce dernier est repensée de manière individuelle. Ce projet, d’inspiration occidentale, et issu du modèle de type cellulaire américain.
[10] Jean-Claude Paye, L’Emprise de l’image, Editions Yves Michel, 2011, « Guantánamo comme réel de la lutte antiterroriste », pp.140 à 147.
[11] Antonio Quinet, Le plus de regard, Destins de la pulsion scopique, Editions du Champ lacanien, Paris, 2003.
[12] In Un taxi pour l’enfer, film documentaire américain réalisé par Alex Gibney, 2007.
[13] Gracilia C. Crespin, « La vitalité rationnelle du bébé », Yacapa.be, p.9.
[14] Stéphane Zagdanski, « La tour de Babel ».
[15] Martine Coenen, Op. Cit, p.88.
[16] Lire : Jean-Claude Paye, Tülay Umay, « Coronavirus : Une nouvelle inquisition », Mondialisation.ca, 9 décembre 2010.
[17] Didier Moulinier, Dictionnaire de la perversion, L’Harmattan 2002. p.76.
[18] Conférence de Philippe Meirieu, « Les enfants de cinéma » – Rencontre nationale École et cinéma– Octobre 2004.
[19] Jacques Lacan a d’abord introduit, dans le champ de la psychanalyse, le terme de jouissance en rapport avec son usage juridique, à savoir la jouissance d’un bien se distinguant de sa nue propriété. Lacan apportera ensuite un redéfinition de cette pulsion de mort freudienne comme étant une pulsation de jouissance, et une pulsation de jouissance qui insiste au moyen et dans la chaîne signifiante inconsciente. Lacan replace donc toute l’affaire de la jouissance au cœur même du champ et de la fonction de la parole et le langage.
[20] Tülay Umay, « Je suis Bruxelles », Mondialisation.ca, le 1er avril 2016.
[21] Dixit Elio di Rupo, ancien premier ministre belge. Elio Di Rupo : « C’est le virus qui est le maître du temps », L’Avenir, 10 mars 2021.
[22] Johannes Lohmann, « Le rapport de l’homme occidental au langage, conscience et forme inconsciente du dicours », Revue Philosophique de Louvain, quatrième série, Tome 72, n°16, 1974, pp. 721-766,
[23] Dictionnaire des risques, sous la direction de Ives Dupont ,Armand Colin, introduction , p.7
[24] Jean-François Courtine, « Réduction, construction et destruction. D’un dialogue à trois : Natorp, Husserl, Heidegger, Archéo-Logique, 2013.
[25] Candy Hoffmann, « Le sacré chez Georges Bataille », Communication, lettres et sciences du langage, Vol.5, n°1, Août 2011, p. 74, Université de Montréal et Université Paris IV-Sorbonne,
[26] David Le Breton, « Masquer », présentation de Le Breton D., Des visages. Essai d’anthropologie, Métailié, Paris, 1992.
[27] Ibidem.
[28] Jean-Jacques Tyszler, « [La pulsion de mort », EPhEP, Cours Histoire et Psychopathologie de J-J.Tyszler, 16octobre 2014.
[29] Jean-François Courtine, Op. Cit., p.574.
[30] Daniel Sibony, « La pandémie corona, petit journal d’idées », Sur et autour de Philippe Sollers, 28 avril 2020.