1. À l’occasion du soixante-dix-septième anniversaire du débarquement de troupes indiennes au Jammu-et-Cachemire, je vous adresse cette lettre pour attirer votre attention sur l’un des plus anciens différends internationaux encore non résolus.
2. Le Conseil est saisi de la question du différend relatif au Jammu-et-Cachemire depuis 1948. Ses résolutions sur la question affirment le droit du peuple cachemirien à l’autodétermination. Elles posent pour principe que « le sort définitif de l’État de Jammu et Cachemire doit être décidé conformément à la volonté des populations, exprimée au moyen de la procédure démocratique d’un plébiscite libre et impartial tenu sous l’égide de l’Organisation des Nations Unies ». Malheureusement, ces résolutions n’ont toujours pas été appliquées à ce jour.
3. Bien que son gouvernement se soit solennellement engagé auprès du peuple du Jammu-et-Cachemire, du Conseil de sécurité et du Pakistan à respecter et à mettre en œuvre les résolutions pertinentes du Conseil, l’Inde est progressivement revenue sur sa parole.
4. Depuis le débarquement de ses forces à Srinagar le 27 octobre 1947, l’Inde a tenté par plusieurs moyens de consolider son occupation illégale du Jammu-et-Cachemire. Cependant, depuis le 5 août 2019, elle mène une campagne plus intense que jamais visant à saper le statut contesté internationalement reconnu dont jouit le Jammu-et-Cachemire sous occupation illégale et à priver le peuple cachemirien de ses moyens d’action. Les autorités indiennes ont pris un certain nombre de mesures visant à modifier la composition démographique et le paysage politique du territoire au cours des cinq dernières années.
5. Les mesures successives imposées par l’Inde au Jammu-et-Cachemire, qu’elle occupe illégalement depuis 77 ans, constituent une violation de la Charte des Nations Unies, des résolutions du Conseil de sécurité et du droit international, notamment de la quatrième Convention de Genève.
6. Aujourd’hui, les autorités indiennes répriment sans relâche les voix dissidentes au Jammu-et-Cachemire qu’elle occupe illégalement. Des milliers de militants politiques et de dissidents sont toujours incarcérés et 14 partis politiques ont été déclarés hors-la-loi. Les médias locaux sont soumis à des restrictions et la société civile est muselée. Des lois draconiennes telles que celles sur la sécurité publique, sur les pouvoirs spéciaux des forces armées et sur la prévention des activités illégales permettent aux forces indiennes d’arrêter ou de tuer qui que ce soit et détruire n’importe quel bien en toute impunité.
7. Les véritables représentants du peuple cachemirien sont derrière les barreaux depuis plusieurs années. Les autorités indiennes ont demandé la peine de mort pour un leader cachemirien de premier plan, Yaseen Malik, qui a été condamné à la réclusion à perpétuité en 2022. Un autre fameux leader, Masarrat Alam Bhatt, est en détention depuis plus de 20 ans. Un dirigeant cachemirien, Shabbir Ahmed Shah, à l’âge de 71 ans, est toujours en prison, où il a passé plus de la moitié de sa vie.
8. Les violations des droits humains dans le Jammu-et-Cachemire illégalement occupé par l’Inde ont été bien établies par des organisations de défense des droits humains et des instances internationales telles que le Haut-Commissariat des Nations Unies aux droits de l’homme. Des titulaires de mandats au titre de procédures spéciales ont déjà exprimé leur inquiétude quant à divers aspects de cette situation déplorable.
9. Les élections de l’assemblée législative du Jammu-et-Cachemire sous occupation illégale indienne ont eu lieu récemment. Cependant, une élection menée selon les règles imposées par la Constitution indienne ne peut se substituer à l’exercice du droit à l’autodétermination.
10. La paix en Asie du Sud reste une priorité pour le Pakistan. Il souhaite entretenir des relations pacifiques avec tous ses voisins, y compris l’Inde. Cela étant, un règlement pacifique du différend du Jammu-et-Cachemire, conformément aux résolutions du Conseil de sécurité et aux aspirations du peuple cachemirien, est essentiel pour une paix durable dans la région.
11. L’histoire témoigne du fait que l’occupation de grandes parties du Jammu-et-Cachemire par l’Inde a menacé la paix et la stabilité régionales à plusieurs reprises. Ces dernières années, les dirigeants indiens ont formulé un certain nombre de revendications injustifiées concernant les territoires de l’Azad Jammu-et-Cachemire et du Gilgit-Baltistan. La fréquence de ces revendications a considérablement augmenté à l’approche des élections nationales indiennes et des élections à l’assemblée législative du Jammu-et-Cachemire sous occupation illégale indienne, qui ont eu lieu cette année. Alors que le Pakistan agit de manière responsable et respecte le cessez-le-feu le long de la ligne de contrôle, les déclarations irresponsables des dirigeants indiens restent un facteur de déstabilisation de l’environnement stratégique en Asie du Sud. Dans ce contexte, je souhaite réitérer l’appel du Pakistan en faveur du renforcement du Groupe d’observateurs militaires des Nations Unies dans l’Inde et le Pakistan.
12. Aujourd’hui, le Jammu-et-Cachemire reste l’une des zones les plus militarisées au monde. Le Conseil de sécurité doit exercer ses responsabilités relatives au maintien de la paix et de la sécurité internationales et prendre les mesures voulues en vue de l’application de ses résolutions relatives au différend du Jammu-et-Cachemire. Le Conseil devrait soutenir pleinement le Secrétaire général dans l’exercice de ses bons offices pour promouvoir une solution équitable au différent du Jammu-et-Cachemire, conformément à ses propres résolutions et à la Charte. Le Conseil devrait également exhorter l’Inde à :
a) annuler ses actions unilatérales et illégales du 5 août 2019 et les mesures ultérieures visant à modifier la démographie et le paysage politique du Jammu-et-Cachemire sous occupation illégale indienne ;
b) améliorer la situation au regard des droits humains au Jammu-et-Cachemire sous occupation illégale indienne ;
c) libérer immédiatement les prisonniers politiques, les défenseurs des droits humains et les dissidents ;
d) mettre fin à l’application des lois d’urgence draconiennes telles que celles sur les pouvoirs spéciaux des forces armées, sur la sécurité publique et sur la prévention des activités illégales ;
e) retirer sa forte présence militaire des villes et villages du Cachemire ;
f) permettre au Haut-Commissariat des Nations Unies aux droits de l’homme, à l’Organisation de la coopération islamique, aux organisations de défense des droits humains et aux médias internationaux d’accéder sans entrave au Jammu-et-Cachemire sous occupation illégale indienne, d’y enquêter et de rendre compte de la situation sur place ;
g) appliquer pleinement les résolutions pertinentes du Conseil de sécurité et permettre au peuple cachemirien d’exercer librement son droit à l’autodétermination dans le cadre d’un plébiscite supervisé par l’ONU.
Référence : ONU S/2024/780