La diversité: le meilleur ingrédient

Apprendre à cuisiner, c’est bien plus qu’apprendre un métier. La nourriture éveille des souvenirs et des sentiments profonds, parce qu’on peut la partager avec sa famille et ses amis et qu’elle reflète la façon dont on se comporte par rapport à son environnement. 

Apprendre à cuisiner, c’est changer de vie. 

C’est précisément l’objectif que j’espère atteindre avec «Cozinha e Voz». Il s’agit d’une initiative lancée conjointement par le ministère public du Travail du Brésil et l’Organisation internationale du Travail (OIT), qui contribue à aider les populations les plus marginalisées – les sans-abri, les femmes victimes de violences, les personnes LGBTI (lesbiennes, gays, bisexuels, transgenres ou intersexués) – à trouver un «vrai» travail. 

Je participe à ce projet depuis décembre 2017. L’idée initiale était de donner des cours de cuisine dans une prison de Salvador de Bahía. Mais j’ai pensé qu’un programme de formation pouvait offrir des possibilités dans le secteur de la restauration. Au Brésil, les gens aiment aller manger au restaurant, activité qui représente trois pour cent du PIB du pays. 

Et c’est ainsi que nous avons lancé notre activité, à São Paulo, avec un groupe de 30 participants transgenre. Depuis, notre projet s’est développé et nous proposons actuellement en moyenne quatre cours par an dans différents Etats, avec des effectifs de 50 à 60 personnes par classe. Cette année, en raison de la pandémie, nous avons dû organiser la formation en ligne et tous les cours ont pu avoir lieu.  

Paola donne un cours de cuisine.

Paola Carosella donne un cours de cuisine.

Les cours englobent neuf disciplines où sont dispensées les compétences de base pour travailler dans la cuisine d’un restaurant, notamment les techniques d’assaisonnement des salades; la préparation des poissons, viandes et légumes; la gestion des déchets; et le stockage des aliments. 

Je mets un point d’honneur à utiliser des ingrédients locaux comme le manioc, le riz et les bananes, car ils sont faciles à obtenir et associés aux racines de la cuisine indigène. Ils font partie d’un héritage qui est en train de se perdre. Mais nous ne cuisinons pas de viande. 

La nourriture pouvant être très suggestive, certains de nos étudiants redécouvrent durant leur formation la saveur des plats que leur mère ou grand-mère avaient l’habitude de préparer. Certains apportent les aliments qu’ils ont cuisinés à leur famille, avec laquelle ils n’ont parfois plus de contact depuis des années. 

Ma propre histoire m’a peut-être aidée à comprendre les personnes qui assistent aux cours. Je suis née en Argentine dans une famille d’immigrés italiens. Ma mère était avocate. Elle m’a transmis un sens aigu de la justice. Et aussi un sens du devoir pour venir en aide aux autres dans l’urgence. Je suis cuisinière depuis 30 ans et, malgré mon succès professionnel, je n’ai jamais oublié que les personnes qui travaillent en cuisine viennent souvent de milieux très modestes. 

Je suis persuadée que la diversité est le meilleur ingrédient, en cuisine comme dans la vie. Travailler avec des gens d’horizons très divers vous enrichit sur le plan personnel. 

Au cours des quatre dernières années, nous avons permis à de nombreux participants d’accéder à des emplois proposés par un réseau d’entreprises partenaires. Deux d’entre eux travaillent dans mes restaurants. 

Je pense que cela est le reflet d’une évolution vers davantage de diversité dans la culture d’entreprise, et je suis persuadée que la diversité est le meilleur ingrédient, en cuisine comme dans la vie. Travailler avec des gens d’horizons très divers vous enrichit sur le plan personnel. 

Cela n’a pas été facile. Mais, grâce au soutien de l’OIT, au financement du ministère du Travail du Brésil et aussi au fait que je sois une cheffe célèbre, nous avons réussi à surmonter de nombreux préjugés. 

Le prochain objectif que je me suis fixé est d’encourager davantage d’entreprises à participer à ce projet, par exemple par des mesures d’incitation (réductions d’impôts) ou des mécanismes d’évaluation qui montreraient qu’elles sont impliquées dans des projets ayant pour but de promouvoir l’intégration des personnes vulnérables. 

J’espère sincèrement que nous parviendrons à inciter d’autres entreprises à participer au projet «Cozinha e Voz», et aider ainsi à promouvoir l’employabilité d’un groupe de population plein de talent mais qui demeure largement exclu. 

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